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    "Comment rendre compte d’une vie infra-ordinaire – selon l’expression de Perec – ou comme tout un chacun qui tente de dire juste sa vie sur un ton juste ? Thierry Radière – dont jusqu’ici le nom m’était inconnu – m’est devenu aussitôt familier et presqu’amical. Il n’est pourtant pas nouveau dans la corporation des poètes (trouver ses anciens recueils !) et maîtrise parfaitement son outil. Lequel ? Celui de tout le monde et de personne. Entre midi et minuit offre trois cents pages de vers libres rangés en trois parties composées entre 2017 et 2019, autant dire hier. Les « Poèmes totémiques » sont dédicacés à des poètes morts ou vivants : Jean-Claude Pirotte dont on retrouve par instants l’éblouissante grisaille, Thierry Metz, Fernando Pessoa – cette tranquille intranquillité –, Nazim Hikmet, Jean Follain, Anise Koltz, Guy Goffette, Georges Bonnet, Valérie Rouzeau, Ariane Dreyfus… et tant d’autres (con)frères en poésie à qui l’auteur adresse ses lettres chaleureuses. « C’est en lisant et relisant / des poètes oubliés / que tes idées te viennent / des voix résonnent / des musiques naissent / et des fantômes te parlent ». « Je n’aurais pas pu voir » et « J’avais déjà dit un jour » sont les deux autres parties, à l’inspiration élégiaque assumée : regrets et petites joies.
    Radière puise dans le quotidien de l’existence commune : on est de plain-pied avec ses poèmes et son inspiration des plus « ordinaires » : une insomnie, l’herbe fraîchement tondue, un dimanche d’ennui, la vue des coquelicots par la fenêtre ou l’expérience de la page blanche et de cette lumière orange qui tombe sur les meubles. Il y a bien sûr l’insatisfaction de vivre sans « Parce que le manque / Est une minuscule geôle / La vie une grande hallucination ». Sommes-nous au monde ? Y sommes-nous comme nous l’aurions voulu ? Autant de questions sans réponses et d’efforts permanents dans la mouvance des jours : « Certainement l’appel de la vie / celle dont la peau et le grain / enveloppent les paysages quotidiens / au point de leur donner / une allure humaine et désirable. »
    La vie est une drôle d’affaire pour chacun, il faut s’en arranger coûte que coûte. Radière a choisi la poésie comme bouée de secours et comme fil d’Ariane, ses vers sont « des tissages venus de nulle part / des broderies pour l’apocalypse ». Sincère, et confident de nos vies rétrécies, le poète croit dur comme fer à la poésie : « des vertus consolatrices / ou peut-être aussi / un pouvoir imaginaire / sur la vraie difficulté / que j’ai à profiter du réel ». Pourtant, il sait tout de même « se noyer en pleine lumière » et profiter de l’offrande du jour. Modeste, certain des limites de son art devant celle qui nous attend tous, Thierry Radière le confesse : « Il faut se rendre à l’évidence : / nous ne sommes rien / nos actions sont des bricolages / d’enfants naïfs et capricieux ». Mais le caprice est légitime, bien légitime : « Comme pour dire non / A l’inéluctable gifle du temps ».
    Frédéric Chef
    Diérèse n°81, mai 2021 (à paraître)
     
     
     
     
     
     
     
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    Avant même l'arrivée du printemps
    les feuilles du peuplier forment de petits miroirs
    frissonnant de la terrasse où nous sommes assis :
    elles reflètent la lumière encore timide de ce début de mars
    que nous observons sans rien dire main dans la main.
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
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    Avant même l'arrivée du printemps
    les fourmis guettent le sucre
    qui tombera bientôt de la galette
    tout juste sortie du four en parfumant la cuisine
    d'effluves de fêtes foraines ardennaises.
     
     
     
     
     
     
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    Avant même l'arrivée du printemps
    nous sentons du salon l'herbe coupée
    et voyons dans le ciel avancer des nuages
    pressés de laisser leur place
    à une nuée de moucherons enivrés.
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
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    Avant même l'arrivée du printemps
    nous entendons de notre chambre
    les oiseaux pépier avec entrain
    et les voitures circuler nonchalamment.
     
     
     
     
     

     
     
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