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Avec la sensation d’une radio éteinte
dans la forêt j’entends le long des chemins
des voix lentes et décousues
à peine audibles mais sereines
me raconter à dormir debout
ce que je n’ai jamais entendu
au berceau près de l’usine
où les ouvriers buvaient fumaient leur café et cigarettes
le cœur dans la tasse leurs femmes au sucre.
Et cette musique sous l’édredon de la chambre du HLM
avait une belle vue sur les vélos rouges
autour des pelouses à pédaler jour et nuit
les freins retapés la veille au soir
après que la tension est descendue sur l’établi
le charbon sent bon le bois
le charbonnier fait peur aux poules.
Tais-toi donc dis vieille buse lui dit-elle
Au bout de la table en habit de communiant.
Je pense à dieu pour m’amuser
et aux buses que j’imagine
je leur mets toutes le visage
de mon arrière-grand-père.
Comme si en dessinant
on vivait mieux la distance.
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Jamais je n’avais songé
disséquer un jour
le réel au scalpel
Et je me rends compte
que je ne fais que ça
dès que je commence à penser
Mais en revanche je savais bien
que la chirurgie m’intéressait
depuis longtemps.
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Je suis rattrapé par des visions
que je m’évertue à maquiller
comme on change un bébé
doucement gauchement aussi
dans l’urgence des préparatifs
et la lenteur des hésitations.
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Il suffit que je fasse une pause après avoir accompli mes obligations de la vie quotidienne pour que j’entende sa voix me préciser d’un air enjoué que je suis bien sur la messagerie de Mélanie, mais que comme elle n’est pas sur son portable vingt quatre heures sur vingt quatre, on peut lui laisser un message et elle rappellera sans faute, à moins qu’elle juge que cela n’en vaille pas la peine. Et puis ce, Allez bises et sans rancune, qu’elle a choisi de dire pour terminer son message, me fait toujours un coup au cœur. C’est un mélange d’audace désinvolte et de douce taquinerie. Elle est très à l’aise du début à la fin de l’enregistrement. Une belle synthèse vocale de ce qu’elle était. Je n’avais jamais pensé - jusqu’à maintenant - qu’on pouvait aussi bien décrire un être par sa voix. Son message est un portrait juste et conforme à la réalité.
Je ne peux pas m’empêcher de penser à ce qu’elle a pu dire à voix haute avant de fermer définitivement les yeux. Personne ne pourra jamais le savoir. Tous ses amis, assis à la terrasse ce soir-là non plus. Ils ont tous été tués sur le coup de plusieurs balles dans le corps. Plus que son visage ou son corps, c’est sa voix que je ne veux pas oublier. Je crois que si un jour je me réveillais et que je ne l’entendais plus dans la messagerie, je ne le supporterais pas.
(Suite et fin de l'incipit de "Sa voix" fiction inédite de 100000 caractères espaces comprises)
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