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    Le clafoutis 
    la tarte 
    le chausson 
    la compote 
    la tarte tatin 
    la pomme d’amour 
    les pommes au four 
    ou natures et bien juteuses 
    dans la journée 
    avant d’aller me coucher 
    en sorbet 
    en crumble 
    dans la salade de fruit 
    en beignet 
    ont tous dans ma bouche 
    ce goût paradoxal du plaisir ultime 
    et de la tristesse des arbres.

     

     

     

     

     

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    Plus personne ne lit de poésie. Elle ne sert à rien. C'est un genre ennuyeux qui va disparaître. Seules les personnes d'un certain âge se déplacent quand il y a des lectures. En plus, elles ne sont pas nombreuses et plutôt discrètes. La poésie contemporaine s'arrête au surréalisme, lit-on dans le Bulletin officiel de l'Education Nationale. Les poètes ne sont pas vraiment des écrivains. Ils composent des poèmes parce qu'ils ne parviennent pas à écrire des romans. Les poèmes sont souvent difficiles à comprendre. Ils s'adressent à des gens initiés. La poésie est gnangnan et idiote. Elle fait pitié. Elle est snobinarde aussi. Elle se la pète quand elle est lue. Les poètes sont imbus de leur personne : ils croient qu'ils sont les meilleurs, que les autres ne valent pas la peine d'être lus. D'ailleurs à ce sujet, eux-mêmes ne lisent pas leurs contemporains, n'achètent pas leurs livres et ne les empruntent surtout pas à la médiathèque de leur ville ou de leur village. La poésie est trop déprimante. Ou trop nombriliste. Parfois, c'est du grand n'importe quoi, sous prétexte que c'est de la poésie. Alors on prétend qu'on fait de la poésie sonore. Les poètes sont persuadés qu'ils ont le monopole de l'émotion, que sans eux, personne n'arrive à toucher comme ils le font le coeur des lecteurs et des lectrices. Quand les poètes lisent, et cela leur arrive quand même, ils clament haut et fort qu'ils ne lisent que de la poésie, il n'y a que ce genre littéraire qui les intéresse et aucun autre. Parce que la poésie est vraiment supérieure au roman. Il n'y a plus de vrais poètes. Les vrais, les purs, les distingués, vivaient tous au 19ème siècle. Eux, c'étaient des poètes. Aucun poète contemporain n'arrive à la cheville de ses aînés. La poésie n'est plus du tout noble comme elle le fut jadis. Pour un oui, pour un non, on aime à employer l'adjectif poétique. Il est synonyme dans ce cas d'émouvant, de personnel, singulier, hors des sentiers battus, inattendu, troublant, onirique, sibyllin, original. Comme si la poésie était tout cela à la fois. La poésie n'a pas le droit d'être légère.

    Et pourtant dès que la poésie contemporaine est approchée de près ou de loin à l'école, au collège, au lycée, à l'université ou bien plus tard par le biais d'ateliers d'écriture, tout le monde s'exclame, Pourquoi personne - sous-entendu aucun prof de français - ne nous en a parlé avant ? Si nos profs l'avaient fait, poursuivent-ils, nous aurions tout de suite adhéré à ce genre qu'on découvre : il nous parle tout de suite, va droit au but, et sans que nous ayons besoin de faire une démonstration pour le prouver.

    Le mystère reste entier. Enfin, façon de parler. Essayer de répondre à la question spontanée et sincère des enfants, adolescents, adultes qui rencontrent pour la première fois des poèmes contemporains, revient à mener une petite enquête sur l'origine du manque, sur l'absence intégrale de références bibliographiques en matière de poésie contemporaine dans les programmes de français. L'institution préfère se référer aux valeurs classiques de la poésie, celles qui sont enseignées aux futurs professeurs de français à l'université et donc ensuite recrachées telles quelles par ces derniers aux élèves pendant leur scolarité. Pourquoi cela ? Il faut bien que les vieux prof de fac enseignent ce sur quoi ils ont travaillé durant leur thèse. Mais alors quand ils partiront en retraite, cela risque de changer la donne, me répondrez-vous. Pas si sûr. Il va falloir du temps, beaucoup de temps pour désapprendre ce que nous avons ingurgité pendant des années et des années d'école et de poèmes - toujours les mêmes - sans intérêt, appris par coeur et récités sans conviction aucune devant notre instituteur dans le seul but de lui prouver qu'on avait de la mémoire. Sans parler de l'illustration graphique qu'il nous a fallu compléter sur la page blanche du cahier de poésie - histoire de lui montrer qu'on avait compris ce qu'on avait dit par coeur.

    Ajouté à cette lacune phénoménale traînée depuis l'enfance, il y a le discours des élites en tout genre et des politiques conservateurs qui considèrent d'un air méprisant la poésie contemporaine comme un ramassis de grossièretés, de textes sans queue ni tête, de bouts de phrases sans ponctuation ni majuscule. Bref du foutage de gueule de A à Z. La poésie contemporaine souffre de cette image véhiculée un peu partout, mais elle résiste et c'est très bien. Ce qui plaît justement à nos jeunes et moins jeunes qui la découvrent c'est qu'elle a du sens, contrairement à ce qu'on essaie de leur inculquer. Ils ont compris qu'ils ont eu tort d'avoir peur d'elle. Ils savent maintenant qu'en ouvrant un recueil de poésie contemporaine, ils seront assez grands pour affirmer sans hésitation, Ce poème me touche, mais pas celui-là. Au lieu de s'exclamer - dès que le mot poésie est prononcé par un professeur de français devant un groupe d'élèves - , J'aime pas la poésie, et je l'ai jamais aimée, c'est nul, ampoulé, maniéré, c'est pour les vieux !

    Pourquoi les élèves du secondaire sont-il aussi catégoriques et surtout remontés contre la poésie ? Pour toutes les raisons que j'ai déjà énoncées - le souvenir du poème appris par coeur à l'école et jamais expliqué par l'instituteur, les procédés littéraires, les figures de styles à connaître sur le bout des doigts, en plus du lexique technique sur la versification - mais aussi et surtout pour l'absence de sens que les enfants sentent dès qu'il sont devant un poème non-contemporain. Cette langue poétique étudiée dans les écoles, collèges, lycées, n'intéresse ses enseignants que pour son côté technique mais jamais pour son aspect historique, politique, sociologique, singulier. Si bien que tout le monde croit que le poème est un objet bizarre - complètement étranger à la vie, surfait, académique, sans rapport avec la réalité - tombé du ciel et spécialement fabriqué pour embêter les élèves, étudiants et adultes, mais certainement pas pour leur donner du plaisir, de la matière à réflexion à émotions et envie d'aller creuser l'oeuvre du poète vu en cours. A tel point que certains élèves s'imaginent que la poésie est écrite par des morts.

     

    Lors de récents salons du livre, je me souviens d'avoir converti à la poésie contemporaine plusieurs lecteurs potentiels qui prétendaient être allergiques à ce genre sibyllin, snob et maniéré, à cause de mauvais souvenirs liés à des exercices académiques, tels que le commentaire composé ou l'étude linéaire, au collège et au lycée. En insistant gentiment pour qu'ils jettent quand même un coup d'oeil à mes recueils - insinuant avec humour que la poésie ne mord pas, même si elle est allergisante -, ils finissaient par lire une page, deux pages, trois pages puis à acheter le livre en me remerciant cent fois de les avoir convaincus que la poésie contemporaine n'a rien à voir avec les souvenirs traumatisants qu'ils avaient vécus adolescents en cours et le jour du Bac. Ces remerciements sont à chaque fois l'occasion pour moi de leur donner des noms de poètes contemporains qu'il faut aller lire. Je suis heureux quand je les vois noter tels des élèves sérieux sur un bout de papier qu'ils rangent dans leur porte-feuille ou glissent dans la poche arrière de leur pantalon, le nom de ces ami(e)s écrivains. En revanche, j'avoue que c'est plus difficile, lors de salons du livre, de convaincre ces hommes et ces femmes guindés, sûrs d'eux-mêmes et convaincus depuis belle lurette qu'un poète qui n'est pas publié à la Pléiade ne mérite même pas d'exister. Cela m'amène à m'interroger sur le profil socio-économique du lectorat de poésie contemporaine. Cette observation n'est pas nouvelle et a déjà été maintes fois étudiée ici et là par les sociologues, mais j'ai remarqué qu'avec le temps, elle se confirme de plus en plus : les lecteurs de poésie contemporaine sont plutôt progressistes que conservateurs. Plus la période est insurrectionnelle, plus les poètes fleurissent et les poèmes pleuvent. Je songe notamment à tous ces poètes haïtiens contemporains qui ne se sortent pas du chaos social dans lequel ils sont plongés depuis tant d'années. Cela ne les empêche pas d'écrire des poèmes, bien au contraire, cela les incite à créer davantage. Il en est de même pour leur production plastique, très riche, elle aussi. Plus un pays s'appauvrit, plus la poésie y est importante. Je songe aussi à ces pays d'Amérique latine, où les poètes sont célébrés et reconnus comme de véritables stars. Ce ne sont là que quelques exemples pris au hasard pour illustrer mon constat, mais il y en a évidemment bien d'autres dans le reste du monde.

    L'intérêt pour la poésie est bel et bien réel. Je dirais même qu'il est croissant - cf le nombre de maisons d'édition qui publient de la poésie, les revues, les sites en ligne, les excellentes critiques de lecteurs et lectrices qui circulent sur le net et dans les journaux. Je le constate chaque jour sur les réseaux sociaux. Certainement en raison de sa forme courte et dense. Certainement en raison de son côté universel. Certainement grâce à sa langue, à ses voix si variées que chacun peut y trouver son compte. Je parie que c'est le genre littéraire du futur, mais cela n'engage que moi.

    Seulement, tant que l'Education Nationale sera frileuse, pudique, et regardera de haut les poètes vivants d'un air méprisant et dédaigneux, justement parce qu'ils sont vivants, politisés, et qu'ils n'ont pas reçu leur certificat de conformité délivré par la gente universitaire française, le chemin va être long. Tout vient de l'éducation et de la place qu'elle accorde à ce genre littéraire pourtant très apprécié des jeunes - souvent en difficulté - quand il est abordé sans prétention ni peur, ni hantise particulière, dans nos écoles, collèges, lycées, universités.

     

    Heureusement que de petits éditeurs ouverts, passionnés et courageux, découvreurs de nouvelles voix, des revuistes curieux et dynamiques, et des chroniqueurs indépendants sont toujours là pour lutter avec intelligence et de plus en plus grâce au web contre les idées reçues, l'immobilisme intellectuel, et le sectarisme ambiant. Ils représentent un réel contre-pouvoir culturel à la pensée unique, à la production lisse, au pédantisme insupportable, et au bavardage démonstratif.

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Si le plus précieux
    de nous-mêmes
    est ce qui reste
    informulé
    d'après Gide
    je comprends pourquoi
    je continue à formuler
    d'une manière ou d'une autre
    mon goût de vivre
    pour la formulation.

     

     

     

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    Plus un bruit soudain 
    que celui des fils électriques 
    se touchant à la vue du ciel 
    au moindre coup d’aile 
    des hirondelles perdues.
     

     

     

     

     

     

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    Et le week-end arrive

    doucement

    à pas de loup

    l’air de rien
    avec ses rides
    de fin de semaine.

     

     

     

     

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