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     L'hiver

     

    L'hiver est une saison que nous appréhendons toujours un peu chaque année. Toi la femme du début du printemps et moi l'homme de la fin d'été. Tu aimais Tahiti parce qu'il n'y avait pas d'hiver, je veux dire pas d'hiver froid comme ici. Là bas il fait vingt et un degrés. Je suis content d'habiter en Vendée parce que les hivers septentrionaux - d'où je viens - m'ont laissé tranquille. Nous sommes d'accord sur ce point, l'hiver est plus beau en image que dans la réalité. Et pourtant tous les ans nous nous réchauffons comme nous pouvons sans penser au froid qu'il fait. Nous avons la chance d'avoir une maison assez grande, chauffée et correctement isolée. Cela aide à ne pas voir passer le temps. Nous sommes sur la même longueur d'onde même les mains froides. Tu te sens encore plus proche de Simenon et moi de Pirotte, à cette période précise de l'année. La littérature nous réchauffe le coeur d'une manière ou d'une autre. Cela est une autre richesse que j'ignorais avant de t'aimer. L'hiver poursuit son travail secret - l'air de rien - de rapprochement et de connivence que nous ignorions avant de vivre ensemble. En hibernant, nous reprenons des forces et nous entretenons notre douce animalité d'amoureux clandestins.

    ( Extrait de Garage, néon, hélicoptère et autres mots d'amour, Editions Jacques Flament, co-écrit avec Balval Ekel )

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    Nous nous disions l’autre jour, avec le groupe de parole, que nous étions tous des gens timides avant qu’un attentat ne bouleverse nos vies. Tous. Pas un seul – ou une seule – des participants n’aimait parler en public de façon générale et encore moins si c’était pour évoquer sa vie privée, ses sentiments ou ses émotions. Quelque chose de dérangeant nous rendait mal à l’aise dès qu’il fallait prendre la parole au sein d’un groupe aussi minime soit-il. Sans doute avions-nous en nous une grosse pudeur que le deuil a effacée. Cela me trouble encore de penser que la disparition d’un être cher puisse changer notre nature profonde. Une parole en entraîne une autre, puis une autre et ainsi de suite jusqu’à ce que des échos se forment et que notre solitude inconsolable se fasse acceptée telle qu’elle est. Nous sommes conscients un peu plus maintenant, que l’équilibre tient à un fil qu’on est sans cesse obligés de retendre jour après jour. Sinon c’est la chute assurée. Nous restons en vie par amour. Peut-être. Et cela j’étais loin de l’imaginer. Je pensais jusque-là qu’il suffisait de perdre un être aimé pour n’être plus rien qu’un homme ou une femme sursitaire.

    ( Extrait d'une courte fiction inédite de 100000 caractères )

     

     

     

     

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    Il suffit que je relise

    quelques vers de Dominique Boudou

    et mon corps se dissout

    avec des restes de questions

    fatiguées de ne trouver

    aucune réponse

    puis sursaute soudain

    dès qu'un souvenir revient

    sans que rien ne bouge

    pour autant.

    (Abécédaire poétique, Editions Gros Textes)

     

     

     

     

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    Il suffit que je relise

    quelques vers de Jean-Claude Pirotte

    et je sais déjà qu'il se finira

    en quatrain que j'adore lire et relire

    parce qu'il en appellera d'autres

    dont je ne me lasserai pas

    à l'instar de ces vêtements

    que je ne voulais pas changer enfant

    que je pouvais porter

    plus de deux semaines à la suite

    parce qu'ils me plaisaient tant

    et que les mettre au sale

    c'était comme me retrouver nu

    pendant plusieurs jours

    le temps qu'ils soient lavés

    séchés et repassés

    avant d'être portés à nouveau.

    ( Extrait de mon Abécédaire poétique, Editions Gros Textes, 2021)

     

     

     

     

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    Dylan Thomas et son bois lacté
    restent au garage à siroter le whisky
    celui des visions incertaines
    que les bars tatouent de figurines
    l'alcool brillant aux lèvres
    les marionnettes parlant en vers
    que la nuit entend
    à se demander si le jour ne sert pas
    au fond à préparer les répliques
    les retours des brusques combats
    entre la vie caverneuse
    et les minuscules morts aériennes
    qu’aucun avion ne réussit à croiser
    parce qu’ils sont de passage
    toujours au moment où les habitants du village
    murmurent des paroles devenues inoubliables
    au Pays de Galles
    et d’ailleurs bien réels.
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
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